Il était une fois un chat perçant...
C'est du haut de la tour qui domine la ville que le vieil Oliva observe souvent ses concitoyens, témoin bonhomme et narquois de leurs étranges manies et de leurs discrets travers, de leur grande mesquinerie et de leurs petits secrets. Philosophe et bohème, complice idéologique du brave Robert, l'instituteur de la région, il lui arrive aussi de servir de modèle aux enfants, dans des cours de dessin improvisés durant lesquels il leur narre, charmés et ravis, sa vie aventureuse et son enchanteresse rencontre avec l'énigmatique Diane et son étonnant chat Mourek aux magiques lunettes, révélatrices de l'état d'âme, du caractère, de la personnalité de chacun. Et tout naturellement, le jour suivant, en fanfare et en fête, dans une rutilante camionnette brinquebalante, débarquent de mystérieux forains, avec leur fascinant magicien, leur adorable trapéziste et son chat portant une redoutable et sibylline paire de lunettes. Et c'est lors d'une unique représentation nocturne, donnée dans la cour intérieur du château, après quelques splendides et aériens numéros de magie et de trapèze, que l'imposant félin quitte ses intrigantes binocles surnaturelles. Immédiatement les nombreuses personnes de l'assistance vont dévoiler contre leur gré, leur vraie nature : les menteurs se colorient en violet, les voleurs et les tricheurs en gris, les inconsistants en jaune, les amoureux en rouge. Cette révélation publique de leur intime personnalité va réveiller la fureur des mécréants qui, le directeur d'école en tête, ne pensent plus qu'à faire disparaître le chat démystificateur. C'est sans compter sur les enfants de la cité qui prendront fait et cause pour l'incroyable matou...
>>> Une merveilleuse petite comédie slave, et plus spécifiquement tchèque, entre poésie éthérée, farce époustouflante et allégorique conte philosophique qui, à travers son onirisme bon enfant, se présente et se révèle comme une implicite mais acerbe critique sociale de l'époque. C'est en effet avec un courage et un culot certains, que le facétieux Vojtech Jasny, bien avant les fameux mouvements politico-culturels de libéralisation du pays, se permet une critique en règle du régime, avec son représentant officiel (le directeur d'école) qui accumule toutes les couleurs et tous les défauts, qui rêve de chasse systématique et de serviles animaux empaillés, à l'opposé du rebelle instituteur local, obligé de biaiser systématiquement avec le constant courroux légal, qui enseigne l'amour et la grâce de tout ce qui vit et palpite...
© Cinéfiches.com (Jean-Claude Fischer)
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