Après huit années passées en prison pour le meurtre de son épouse qu'il surprit une nuit, "alanguie" dans les bras de son amant, Takuro Yamashita, désormais en liberté conditionnelle, s'installe dans une friche industrielle, non loin de Tokyo, où il ouvre un salon de coiffure, qu'il retape de ses propres mains. Solitaire et reclus dans son traumatisant passé, il n'a de seul confident qu'une anguille, apprivoisée lors de son séjour derrière les barreaux. Un jour, il sauve d'une tentative de suicide, une jeune femme, prénommée Keiko, qui va devenir son assistante dans le salon de coiffure...
- Cinéma numéros 588 et 591
- Fiche de Monsieur Cinéma
- L'Annuel 1998
- Télérama numéro 2490
- Positif numéros 437/438 et 440
- Cahiers du Cinéma nuùéros 514 et 517
- La Saison Cinématographique 1997
Critiques (Public)
16/20 : Adapté d'une nouvelle et somptueusement mis en scène. Le Japon rural, avec cette nonchalance entre occupations terre-à-terre aux côtés d'une épouse et la pêche réservée aux hommes, de jour ou de nuit, rite immuable. L'eau toujours toute proche agirait-elle en purificatrice ?... Ce jeune égaré tue sa femme par coup de sang et se livre tout de suite après aux autorités (en fredonnant sur le trajet !) dans une logique qu'on doit payer pour ses bêtises, en porter le poids afin de renaître en s'aidant comme on peut, au besoin d'une anguille, comme un estropié d'une béquille. Tout au long du voyage - on s'évade très loin avec ce virtuose de la caméra - la question demeure : qui donc a écrit la lettre anonyme qui fit tout basculer ?... C'est POETIQUE (le symbole du poisson dans l'eau, celui d'un enfant à naître), COMIQUE (pas de l'oie des prisonniers, flamenco en territoire japonais, cérémonial du casse-croûte salué par un crapaud espiègle, tandis que le bonze avec son visage d'otarie affiche une bonhomie désopilante). C'est ESTHETIQUE, je pense au petit seau rose fluo assorti aux fleurettes, à la jeune suicidaire allongée dans l'herbe verte de verte, à ses pieds quand elle bondit de sa bicyclette, ou encore à l'ambiance du salon avec le petit garçon qui s'éclate...). Il y a aussi de la profondeur : l'indice PSYCHOLOGIQUE (mère dérangée) justifie bien le désespoir qui peut s'insinuer dans une jeune tête... Avec tout ça, c'est TERRIFIANT : la colère contre lui-même de cet incorrigible impulsif, et puis ces déchaînements de violence physique, celle du début, et les autres, collectives ! Atmosphère pittoresque dans cette reconversion de coiffeur assisté, et une forme d'oxygène inattendue sur la fin ! Déroutant mais délicieux. L.Ventriloque