NOI ALBINOI - 2002

Titre VF NOI ALBINOI
Titre VO Noi albinoi
Année de réalisation 2002
Nationalité Islande
Durée 1h33
Genre DRAME
Notation 14
Date de sortie en France 09/07/2003
Thème(s)
Alcoolisme et autres beuveries (Cinéma islandais)
Cinéma islandais (ORIGINE)
Avalanches (tous pays confondus)
Handicapés mentaux (tous pays confondus)
Cimetières (tous pays confondus)
Festival du Cinéma Nordique de Rouen (Grand Prix)
Albinos ( tous pays confondus)
Talkies-walkies (tous pays confondus)
Arc-en-ciel (tous pays confondus)
Karaoké
Réalisateur(s)
KARI Dagur
Chef(s) Opérateur(s)
VIDEBAEK Rasmus
Musique
JONSSON Orri
Renseignements complémentaires
Scénario et musique : Dagur Kari
Distribution : Haut et Court

Visa d'exploitation : 108 487

Nota :

- Meilleur Film Nordique, Goteborg 2003

- Prix FIPRESCI et Movie Zone, Rotterdam

- Grand Prix Jury et Meilleure Musique Angers 2003

- Grand Prix du Jury, Rouen 2003 
Acteurs
LEMARQUIS Tomas
GUNNARSSON Thröstur Leo
HANSDOTTIR Elin
FRIDRIKSDOTTIR Anna
ROGNVALDSSON Hjalti
EINARSSON Petur
BJARGMUNDSSON Kjartan
GUNNARSSON Thorsteinn
OLAFSSON Gudmundur
JONSSON Haraldur
LEMARQUIS Gérard
GISLASON Greipur
LOFTSSON Pall
THORODDSEN Asdis
ASMUDSSON Asmundur
PROPPE Ottarr
ELIASDOTTIR Gunnhildur Björk
REYNISSON Unnar
GEIRSSON Sveinn
GUDMUNDSSON Thorgeir
HELGASON Helgi E.
Résumé

Noi, dix-sept ans, vit au fin fond d'un fjord islandais, entre un père passablement alcoolique et fort velléitaire, et une grand-mère excentrique et décalée, sèchant les cours avec régularité, préférant jouer au mastermind avec l'inculte libraire de la région. Le garçon, considéré comme un génie par le psychologue de l'école, se sent fort attiré vers Iris, une sympathique demoiselle, revenue au village, qui s'occupe de la station-service-bar, et ne rêve plus que de partir au loin, avec elle, à Tahiti, par exemple...

>>> Lumineuse noirceur islandaise !

Bibliographie
- Fiche de Monsieur Cinéma
- Annuel du Cinéma 2004
Critiques (Public)

Nói, dix-sept ans, peine à se lever pour aller en cours. Sa grand-mère, pour l’aider, utilise un moyen radical : elle tire un coup de fusil de chasse depuis la fenêtre de sa chambre. Ainsi commence le premier film de Dagur Kári. De manière décalée. Nói a l’habitude de sécher les cours et, quand il y assiste, il rend fous ses professeurs par son indiscipline. Ce grand jeune homme au physique mystérieux, au crâne rasé (ce qui ne permet pas de vérifier s’il est effectivement albinos, comme l’annonce le titre), passe ses journées à la station-service où il a trouvé le moyen de se faire un peu d’argent de poche en trafiquant la machine à sous ; ou bien il joue au « Master Mind » avec le libraire du village qu’il bat toujours… Nói ne semble pas fait pour le lycée. Il inquiète son directeur qui a de la sympathie pour lui. Il sent que Nói est un surdoué. D’autres pensent plutôt qu’il est l’idiot du village… Le jeune homme vit chez sa grand-mère. Son père, chauffeur de taxi, est resté un grand enfant, totalement irresponsable, au point qu’entre lui et son fils les rôles s’inversent. Les choses changent quand Nói rencontre Iris, la fille du libraire, venue pour travailler quelque temps à la station-service. Il en tombe amoureux et Iris n’est pas indifférente. Nói sort alors de sa solitude. Il n’a pas d’ami véritable : ni le libraire, ni son voisin de classe ne peuvent endosser ce statut. C’est peut-être son père qui est son « meilleur copain ». Nói se réfugie souvent dans la cave de la maison de sa grand-mère. Accoutumé à la solitude, il la préserve jalousement et s’octroie ces séances de silence et de pénombre un peu morbides. Comment ne pas penser à une inhumation volontaire ? D’ailleurs, après son renvoi du lycée, son père lui trouve une place de fossoyeur. L’idylle avec Iris tourne mal. Nói prend l’histoire trop à cœur et effraie la jeune fille. Dans une scène cocasse, il tente de braquer la banque. Personne ne le prend au sérieux car tout le monde connaît Nói au village. On lui retire le fusil des mains et il se retrouve dehors piteux comme un petit garçon corrigé. Il revient néanmoins à la banque, mais cette fois en tant que client qui retire l’argent de son compte. Il s’achète des vêtements puis il vole une voiture pour aller chercher Iris. Le braquage de la banque, l’achat des vêtements et le vol de la voiture sont destinés à impressionner Iris. Ils avaient vaguement parlé de quitter l’Islande ensemble : le hasard avait désigné Hawaï. Iris, dubitative et surtout effrayée ne bouge pas. Nói, déçu, repart avec la voiture mais est arrêté par la police. Après quelques heures de prison, la vie reprend comme avant : Nói retourne dans la cave. C’est pendant qu’il s’y trouve que se produit une avalanche. Il est bloqué. Quand il est secouru, Nói ne réalise pas véritablement ce qui s’est passé et il prend même la chose plutôt légèrement, comme une diversion dans la monotonie de sa vie. Alors qu’il se restaure avec d’autres rescapés en regardant la télévision, les noms des victimes défilent sur l’écran : son père, sa grand-mère, Iris, son camarade de classe, le libraire et le directeur de son lycée sont du nombre. Nói réalise enfin quelle est la situation. Il ne semblait pas s’inquiéter du sort de ces personnes, il se rend finalement compte enfin qu’elles constituaient son univers. En les perdant, il est maintenant vraiment seul. Les larmes qui lui viennent aux yeux expriment enfin les sentiments qu’il est capable de ressentir.

Ce premier film de Dagur Kári a reçu le prix du festival d’Angers « Premiers plans » en 2003. Il est vrai que cette œuvre est prometteuse. Sous ses airs glacés, en cherchant bien, on peut trouver une grande sensibilité qui est inversement proportionnelle aux efforts déployés pour la masquer. Ce film traite d’une histoire de solitude. Celle d’un enfant sans mère, pour ainsi dire sans père, sans amis : la rencontre avec Iris semble providentielle à Nói. Ceci explique sans doute son attitude extrême envers elle. Il côtoyait pourtant ces gens dont il réalise qu’ils comptaient pour lui, qu’ils étaient autour de lui comme des amis potentiels. Peut-être regrette-t-il de les avoir traités avec distance, hostilité ou indifférence. La catastrophe finale est annoncée tout au long du film, mais elle n’est pas « téléphonée ». L’avalanche reste une surprise pour le spectateur. Ce n’est qu’a posteriori que l’on comprend les indices annonciateurs. L’indice le plus explicite était l’annonce, par un homme qui lisait dans le marc de café, qu’une mort surviendrait bientôt autour de Nói. Il n’y a pas cru, moi si. Mais j’avais pensé à la grand-mère ou au père, pas à tous les personnages secondaires qui gravitaient autour de Nói ! D’autres indices pouvaient également annoncer la mort : Nói (comme je l’ai déjà écrit) avec son aspect spectral, s’enterre lui-même dans la cave (Tómas Lemarquis pourrait jouer Nosferatu rentrant dans son cercueil au petit matin) ; il devient fossoyeur ; il semble s’intéresser au livre que le libraire jette à la poubelle dont l’auteur a un nom évocateur : « cimetière » (à savoir, un certain Kierkegaard). Si l’on ajoute à tout cela son absence de sourires, son ennui (« mortel » comme on dit), etc., on peut penser que Nói n’est pas vivant, qu’il est déjà mort ou destiné au suicide. Le vrai sujet du film est exposé là de manière très fine : la solitude est mortifère, l’autarcie affective est impossible et illusoire (Nói me semble en effet un brin narcissique). On n’existe pas seul, sous peine de devenir fou ou d’en mourir. C’est notre rapport aux autres qui nous tient vivant. Nói le comprend trop tard. Ce film est en cela très touchant. Toutefois, la gravité du propos tranche avec quelques scènes cocasses bien venues pour éviter la déprime à la sortie de la salle. On reverra Tómas Lemarquis bientôt, je l’espère, et l’on attend le prochain film de Dagur Kári plein d’espoir. Hervé Naveau

Dagur Kári Pétursson est né en 1973 à Paris, où il a vécu ses trois premières années, avant de regagner l'Islande. Il a étudié quatre ans le cinéma à la Danske Filmskole, où il passe son examen terminal en 1999. Son court métrage de fin d'étude Week-end fichu reçoit une bonne dizaine de prix internationaux (festivals de Poitiers, Angers, Tel Aviv, Brest, Munich). Dagur Kári est également musicien et joue dans le groupe Slowblow.
Nói albínói ; Titre original : Nói albínói ; Production: Zik Zak Kvikmyndir, Essential Filmproduktion GmbH, Le Bureau, M&M Productions, United King Films. Réalisation : Dagur Kári ; Scénario : Dagur Kári ; Photographie : Rasmus Videbæk ; Musi-que : Orri Jonsson & Dagur Kári ; Montage : Daniel Dencik ; Décor : Jón Steinar Ragnarsson ; Producteur : Philippe Bober, Kim Magnusson, Skúli F. Malmquist & Thórir Snær Sigurjónsson ; Son : Pétur Eínarsson ; Costumes : Linda B. Árnadóttir & Tanja Dehmel ; Maquillage & coiffure : Frida Metúsalemsdóttir ; Assistant : Ásdís Thoroddsen (réal) ; Autres collaborateurs : Soledad Gatti-Pascual (coprod.), Lene Ingemann, Thorfinnur Omarsson, Tiva Magnusson, Lucas Schmidt, Michael Schmidt-Ospach, Paul Trijbits, Vinca Wiedemann, Susanne Marian & Klaus Keil (prod. exécutifs). Interprétation : Tómas Lemarquis (Nói), Thröstur Leo Gunnarsson (Kiddi Beikon), Elín Hansdóttir (Iris), Anna Fridriksdóttir (Lina), Hjalti Rögnvaldsson (Óskar), Kjartan Bjargmundsson (Gylfi), Greipur Gíslason (Dabbi), Pétur Eínarsson (Prestur), Gérard Lemarquis (le professeur fran-çais). Durée : 93 mn ; Sortie en Islande : 28 février 2003 ; Sortie : 9 juillet 2003 ; Distribution : Hant et Court.

Filmographie

1997 - The violin maker, cm
1998 - Old spice, cm
1999 - Lost weekend (Week-end fichu), cm
2000 - Professional darkness, cm
2001 - Dramarama (un des 5 épisodes du film)
2003 - Nói albínói

TEXTE ET CRITIQUE (3°) REDIGES PAR Denis BALLU