"Dans la ville de Sylvia" ou trois jours et trois nuits dans le centre de Strasbourg. Un jeune homme d'origine ibérique qui a connu et certainement aimé, il y a maintenant six ans, une demoiselle rencontrée au fameux "Bar des Aviateurs", passage obligé de tous les branchés de la cité, est de retour pour quelques journées dans la capitale européenne, avec le secret espoir de croiser à nouveau, celle qu'il n'a visiblement pas oubliée. Ce qui ne l'empêche nullement de jeter un oeil énamouré, discrètement quémandeur sur les nombreuses jeunes filles attablées à la terrasse de l'Ecole Supérieur d'Art Dramatique, les croquant d'un habile coup de crayon dans son inséparable calepin, à défaut de griffonnages et d'esquisses plus concrètes. Après quelques interminables moments à observer, ébaucher et se désaltérer, notre laborieux scrutateur au regard languide et constipé, se décide finalement à suivre l'une d'elles, à travers le dédale anonyme des rues et ruelles du vieux Strasbourg. Après l'avoir perdue de vue, puis retrouvée, il finit enfin par l'accoster dans le tram et la courte entrevue qui s'en suit, tourne rapidement en eau de boudin (alsacien), bredouillée de vagues excuses contrites et de confus regrets bancals. Heureusement pour tout le monde (qui s'en fout) , notre opiniâtre garçon parviendra tout de même à lever une moins farouche donzelle, toujours au fameux bar des planants, et se réveillera en sa compagnie, dans une petite chambre à l'hôtel Patricia, 1A rue du puits (Séjour accueillant et confortable) recommandé pour tous les guides touristiques sérieux...
- Télérama numéro 3061 (semaine du 13/09 au 19/09/08)
- Cahiers du Cinéma numéro 637
- Libération du 10 septembre 2008
- Positif numéros 561, 563, 571
- Annuel Cinéma 2009
Critiques (Public)
15/20 : Découvert au festival espagnol nantais de mars 2008. Culte du beau et goût du lancinant. Le plus pesant : les longueurs inutiles. Le plus accrocheur : le physique de l'acteur masculin, il rêve d'absolu et on se demande bien sur quoi ça va déboucher. Parfait évaporé, rempli d'entêtement amoureux adolescent(e), cette névrose alimentée par le fantasme et qui fait se décliner les partenaires comme autant de modèles féminins à immortaliser sur papier. Voyeurisme de bon ton. Suite de tests à partir d'un souvenir édulcoré. Convoitise (du peintre ou du photographe ici, accessoirement du mâle). Délire de l'assaut sans cesse remis pour préserver l'enchantement de petit garçon tout-puissant, volonté de se diluer dans l'extase obsessionnelle. Les esthètes peuvent adhérer, dommage qu'il y ait ce brin de maniérisme, cette non-vie dans les personnages réduits à l'état de pantins par moments (splendides jeunes filles cependant). Bavards, hyperactifs, passez votre chemin... C'est austère et plein de vacuité, mais savamment orchestré par ce "plus que Rohmer" espagnol. Peut-être comme moi, tiendrez-vous toute la séance grâce au jeune Apollon, mince mobile, digne des midinettes ou des grands dadets des Ecoles de Dessin snobs. Le personnage principal est la seule carte de ce cinéaste (un peu comme dans le film "Mort à Venise"), en plus de savoir filmer avec art. Il importe d'avoir beaucoup gambergé soi-même à des périodes par ennui ou suite à des déceptions cuisantes (rupture, exil, pensionnat, longue maladie, emprisonnement)... Flatteur et/ou exécrable pour Strasbourg en tant que ville ! Envoûte, endort, tiraille ou fait hurler ! L.Ventriloque