Menant une existence sans aucun relief ni perspective existentiels, entre un emploi subalterne dans un obscur service d'aide sociale au gouvernement du Québec et une vie de famille réduite aux apparences et à la simulation, Jean-Marc Leblanc se réfugie dans un riche imaginaire où il est enfin reconnu, compris, aimé. En effet, tributaire d'un long trajet journalier (voiture, train, métro) pour se rendre à Montréal, écrasé par la redoutable Carole Bigras-Bourque, sa responsable hiérarchique, ignoré par son épouse Sylvie, efficace agent immobilier vivant avec un téléphone perpétuellement greffé à son oreille, délaissé par ses deux enfants plus branchés vers les jeux électroniques et les flirts adolescents, avec une mère grabataire et catatonique recluse dans un institut spécialisé, notre insipide fonctionnaire compense cette dramatique absence de chaleur humaine en s'inventant une stature sociale remarquée et remarquable, en contrepoint de la médiocrité ambiante, tour à tour écrivain réputé, dramaturge célèbre, samouraï vengeur, homme politique illustre et autres César de la renommée. Ces fantasmes quotidiennes de réussite sociale et mondain s'illuminent en plus de nombreuses chimères de conquêtes féminines dans lesquelles de pulpeuses et fougueuses créatures le sollicitent sans cesse et sans retenue...
>>> Dernier fragment d'une intéressante trilogie sur les abîmes et les errements de la nature humaine, après le fort controversé "DECLIN DE L'EMPIRE AMERICAIN" et les fulgurantes "INVASIONS BARBARES" cette peinture sombre et désespérée de la société occidentale en lente désintégration, est plutôt bienvenue et salutaire, malgré quelques scènes inutiles et lourdes et un segment (celui consacré à la comtesse Béatrice de Savoie) d'une pétrifiante stupidité. Dommage pour ce navrant et sombre bémol...
© Cinéfiches.com (Jean-Claude Fischer)
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