Menard, une petite ville du Middle West américain, au fin fond du Texas. Venu de la lointaine Manchester (GB) le réalisateur britannique Michael Grigsby a filmé et interviewé trois jeunes vétérans de retour de la guerre du Vietnam, (Lemarr Wyatt, Dennis Bollinger et David Johnson) leur laissant une totale liberté quant à la verbalisation de l'événement guerrier qui leur pris une partie de leur jeunesse et de leur intégrité. Ainsi chacun évoque, non pas des faits martiaux ou des épisodes armés du dramatique conflit, mais ce qu'ils sont devenus à leur retour, minés par un besoin effréné de se raccrocher à quelque chose (une puissante corvette bleue pour l'un, la pêche pour un autre, un vague projet pour le troisième) et de s'isoler du reste de la communauté. Par delà les séquelles apparentes et récurrentes, comme la peur des bruits insolites, des détonations, des lumières vives, une pénible propension aux cauchemars, à l'angoisse, au somnambulisme, on peut imaginer les profonds ravages psychiques, souvent imperceptibles et définitifs causés à une personnalité ainsi ébranlée, fragilisée. "Qu'est-ce qui se passe dans la tête de quelqu'un, qu'on vient chercher dans une petite ville et qu'on envoie là-bas (au Vietnam) pendant un an, dix-huit mois, puis qu'on renvoie chez lui" ? Question lapidaire mais essentielle, formulée par le réalisateur qui donne tout son sens à son percutant moyen métrage...

>>> Encore une oeuvre exemplaire et salutaire, d'un metteur en scène anglais discret et pourtant majeur, qui fut l'un des grands représentants du free cinéma britannique, avec sa sourde pertinence et sa constante véracité humaine...
© Cinéfiches.com (Jean-Claude Fischer)