Oncle Boonmee est gravement malade. Son état valétudinaire nécessite une quotidienne dialyse que lui administre avec dévouement et dextérité, un serviteur laotien prénommé Jaai, oeuvrant dans le vaste domaine apicole de notre moribond Thaïlandais qui attend, entouré des siens, la mort prochaine. Cet inéluctable terme à sa vie et sa matérialité actuelles lui est induit par l'apparition de sa défunte épouse Huay et la venue de son fils Tong, disparu depuis des années dans la forêt proche, aujourd'hui réincarné dans un velu et paisible singe-fantôme, tous deux désormais présents au nocturne et paisible repas vespéral que Boonmee partage avec sa soeur Jen et son aide attitré. En effet, il est bientôt l'heure de rejoindre la grotte utérine et scintillante de ses origines, pour peut-être recommencer une nouvelle existence...
- Canard Enchaîné du 1er septembre 2010
- Libération du 1er septembre 2010
- Fiche de Monsieur Cinéma
Critiques (Public)
17/20 : Balade dans une jungle où un murmure de basses rassure tout de suite... On vient à la rencontre de l'oncle aux reins défaillants, des apparitions tout ce qu'il y a de gentil. Il doit "naître à rebours", aller se perdre au fin fond des grottes (bien des similitudes avec "Tropical Malady"). Autant se caler dans son fauteuil, fondu dans la pénombre, faire corps avec la nature moite, arrêter de penser... S'en remettre à l'eau, les pas dans la végétation, le très lent déplacement de caméra vers dieu sait quelle curiosité... Apichatpong Weerasethakul, surnommé "Joe" ou "le David Lynch thaïlandais", aurait beaucoup puisé chez l'Américain Bruce Baillie ("Castro Street") : la passion des tunnels tourmentés ouvrant sur le soleil leur est commune. Rien n'interdit de se remémorer Pink Floyd non plus ("A saucerful of secrets")... C'est toujours beau, féérique, purifiant. On se croit dans un conte pour adulte. Las, l'animisme majoritaire dans lequel on s'est allongé, confiant, finit par décontenancer, il y a télescopage avec les éclats de mondialisation, une uniformisation de comportements devenant pesante sous toutes les latitudes... Résultat, on est zen mais avec une légère gueule de bois. A regarder de plus près la production précédente de ce plasticien, il sait pourtant raconter la Thaïlande actuelle de manière moins emberlificotée. Il gagnerait à approfondir, qu'on retienne quelque chose en plus de l'envoûtement... "L'Etat du monde" (pour la partie qui le concerne) semblerait plus engagé. "Syndromes at a century" et "Blissfully yours", enchanteurs et moins hallucinogènes. A suivre !
L.Ventriloque