"Vous qui croyez à l'affection qui se nourrit d'espoir,
 Vous qui croyez à la beauté du dévouement d'une femme,
 Ecoutez la complainte chantée encore par les pins,
 Le doux poème d'Acadie, pays des hommes heureux"...

Grand-Pré, un modeste et paisible village rural, situé en bord de mer, dont la population essentiellement acadienne vit selon l'habituel rythme des saisons et les paisibles traditions de leurs lointains ancêtres français. Il y a Michael le ménétrier qui de son violon accompagne tous les événements, petits et grands, de l'harmonieuse communauté ; le Père Félician, placide et sage curé de la paroisse ; René La Blanc, efficace notaire de campagne et son fils Baptiste, un doux jeune homme, amoureux de la délicieuse Evangeline, la fille d'un riche fermier de la contrée, mais qui n'est pas aimé en retour, la belle ayant définitivement donné son coeur au robuste Gabriel, l'unique garçon de Basile le forgeron, un sympathique colosse affable et débonnaire. Cette sereine quiétude collective va se retrouver profondément bouleversée par un sentencieux avis placardé sur la place principale, ordonnant à tous de faire allégeance au roi George II et d'engager leur vie et leurs biens pour l'Angleterre dans la guerre qui l'oppose, depuis peu, aux rugueux Français. Une revendicative délégation, composée du ménétrier, du forgeron et du curé, se rend auprès du gouverneur général britannique, dans la cité d'Halifax, pour protester de cette atteinte à leurs libertés, expliquant qu'ils sont soumis à l'Angleterre par le devoir et à la France, par le sang et réclamant ainsi une bienveillante neutralité. Après quelques semaines de fausse réflexion, l'officier anglais envoie dans la province de Grand-Pré, l'énergique colonel Winslow, dont les troupes débarquent en nombre durant les joyeuses festivités en l'honneur des fiançailles d'Evangeline et Gabriel. Manu militari, on leur annonce que, face au refus réitéré de combattre dans les rangs de la Couronne, leurs terres et leurs bêtes sont confisquées, les maisons seront brûlées et toute la population déportée dans de lointaines provinces éloignées. Embarquées de force sur des navires amarrés au large, bien des familles vont se trouver divisées, disloquées, perdues. Pour nos deux amoureux, une douloureuse séparation commence qui va perdurer des années, jusqu'à des dramatiques retrouvailles dans un triste faubourg de la morne ville de Philadelphie, où Gabriel se meurt doucement dans un vague hospice, le corps ravagé par une épidémie de peste qui décime lentement la région...

>>> L'obsession amoureuse d'Evangeline pour Gabriel, considérée par beaucoup comme un des archétypes de l'éternelle quête passionnelle, au même titre que Roméo et Juliette, Eurydice et Orphée, Paul et Virginie, à travers les méandres du temps et l'abîme des séparations, et en dépit des vicissitudes et des aléas d'une existence incertaine et précaire, uniquement orientée vers une inlassable et fragile recherche de l'être aimé, perdu au loin, toujours absent, toujours désiré, attendu et rêvé, obstinément. Pour notre part, et malgré l'excellente interprétation de Dolorès del Rio, souveraine et magnifique, face à un partenaire plutôt effacé voire quelconque, on préfère de loin les remarquables séquences descriptives d'un microcosme villageois et sa suave peinture de quelques personnages du cru, hauts en couleur et en pétulance...
© Cinéfiches.com (Jean-Claude Fischer)