C'est dans la région de Cochabamba, au sud-est de la capitale bolivienne, que le réalisateur ibérique Sebastian a établi ses quartiers généraux pour le tournage de son nouveau film consacré à la vie de Bartholomé de Las Casas, colonisateur d'origine espagnol (1474-1566) qui, après s'être fait ordonner prêtre, devint le plus rigoureux et le plus inflexible défenseur de la cause des Indiens. C'est donc en étroite collaboration avec son producteur Costa que notre metteur en scène recrute, pour une bouchée de pain, plus de deux cents figurants au sein de la population locale des Quetchuas. Parmi eux, un certain Daniel, prévu pour interpréter le rôle clé du rebelle Hatuey, un farouche opposant à la tyrannie des conquistadors, qui lui-même, dans son quotidien, se bat et lutte énergiquement, avec ses compatriotes sur une inique privatisation de l'eau par une multinationale qui voudrait faire payer aux habitants de la cité, une redevance pour utiliser l'ensemble des puits artésiens ou de rétention. Rapidement la situation dégénère et la poursuite du tournage semble désormais de plus en plus compromise, alors même que l'intervention militaire s'intensifie...
- Libération du 5 janvier 2011
- Le Canard Enchaîné du 12 janvier 2011
- Fiche de Monsieur Cinéma
Critiques (Public)
19/20 : Ah la la, ce que c'est bien ! E-blou-iss-ant ! Ne pas craindre l'exhortation "changer le monde commence par changer soi-même", s'il se dégage une morale, chacun en prend pour son grade. A retenir la photo, acrobatique, vivante, souvent latérale, avec cette surprise du flou pour pointer ce que l'oeil aurait escamoté. Ces dialogues très ajustés à l'action, ça pulse sans qu'on s'en rende compte. Formidable bande-son, jamais elle n'entête mais quel précieux repère ! Paul Laverty, le neuf fois scénariste de Ken Loach et Iciar Bollain, la réalisatrice de "Mataharis" et "Ne dis rien" ensemble : deux virtuoses d'un cinéma grave, mais qui se boit comme du petit lait. A partir d'un drame social remontant à 2000, défilent tous les points de vue appelés à se frictionner. En plus du soulèvement contre la confiscation de l'eau par le privé, remontent les raffinements de la colonisation. Un instant aux confins du fantastique : ce "l'eau est à vous" (pulvérisant "l'eau a un coût" du capitalisme sauvage). Il y a certes un peu de violence. Et de la tendresse virile aussi. Le plaisir de retrouver Luis Tosar ("Malamadre" dans "Cellule 211") et Gael Garcia Bernal, la découverte d'Almodovar enfin de retour avec un rôle en or. La Bolivie est également un personnage ici. Fier, changeant avec ses "gueules" et ses bébés qui pleurent dans les bras maternels. Un film qu'il faut courir voir. L.Ventriloque