La fin de la Seconde Guerre Mondiale est proche et les Allemands, pour tenter d'enrayer l'inéluctable défaite, commencent à enrôler massivement des adolescents qui sont formés et conditionnés hâtivement aux rudiments des armes et du nazisme triomphant. Parmi ces jeunes, en certitude et formation accélérées, un gamin malingre et quelque peu chétif, prénommé Jojo, affublé du dérisoire surnom de Rabbit, pour ne pas avoir pu occire un lapin lors d'une séance démonstrative de la fougue attendue des salvatrices jeunesses hitlériennes. Une mortifère déconvenue inversement proportionnelle aux évidences gammées du jeune adolescent qui ne jure que par les harangues de son chef suprême qu'il encense et vénère au point d'avoir pour confident fictif, une sorte de clone dégingandé du Führer. Par contre, la mère du garçon, toute en douceur et discrétion, à l'opposé de son pugnace et bouillonnant fiston, est résolument ancrée dans l'opposition au nazisme, hébergeant dans une pièce cachée de son immense maison, une jeune Juive de seize ans prénommée Elsa. Inévitablement, Jojo et la demoiselle vont finir par se croiser et déclencher bien des questionnements inéluctables et séditieux, sous l'injonction d'un timide sentiment amoureux naissant...
Bien que faisant partie des "puristes et grincheux de l'orthodoxie historique et cinématographique, droits dans leurs futiles convictions", je vais néanmoins donner mon avis :
On peut faire de l'humour avec tout sujet, et la guerre n'est pas un sujet tabou. Après tout, Chaplin a fait "Le dictateur" dès 1939, Lubitsch a osé "To be or not to be" en 1942. Les Français se sont précipités voir "La grande vadrouille" 20 ans seulement après la fin de la guerre, pour oublier le désastre national que fut l'Occupation. Plus tard, Radu Mihaileanu avait tenté un exercice difficile avec "Train de vie", et Roberto Benigni a réussi a nous arracher des larmes en faisant le clown pour son fils dans "La vie est belle". Oui, on peut rire de tout, on peut faire rire de tout. On le doit même, si on en est capable, car le rire est le seul antidote au désespoir.
Ce qui est coupable par contre, c'est de prétendre faire une comédie, et d'utiliser les événements historiques tragiques pour remuer du pathos et des bons sentiments, et faire accroire qu'on sait créer de l'émotion et qu'on est sensible au drame humain.
Waititi refait exactement la même confusion que dans "Hunt for the wilder people", où le drame initial perdait son essence pour finir en bouffonnerie grotesque. Avec Jojo Rabbit, c'est pire, car tout est faux dès le départ, et rien ne nous fait rire. Une chanson des Beatles sur des images de foule acclamant Hitler, c'est affligeant. Les pitreries au cours du camp d'entrainement des "Hitler's Jugend" ne sont jamais drôles et les mauvaises blagues de potache passent complètement à côté du sujet réellement terrifiant qu'aurait été l'embrigadement de cette jeunesse. La rencontre entre un enfant des "Hitler's Jugend" et d'un fille juive cachée aurait du donner quelque chose de beaucoup plus intense que ces bavardages niais et creux.
Et que dire de Waititi lui-même, déguisé en Hitler d'opérette ? Si l'artiste peut tout oser, le mauvais goût ne le peut pas.
Ce film voudrait passer pour une dénonciation de ceci ou cela; mais non, il ne dénonce rien du tout. Il fait son intéressant, un peu à la Wes Anderson, pour obtenir le label "décalé", ou mieux "déjanté".
Ce n'est pas respecter la mémoire de ceux qui ont vécu le drame que de leur infliger ce vomi d'Histoire mal digérée. Le message que les derniers survivants de la Seconde guerre mondiale essaient de faire passer dans les écoles sera inaudible pour des enfants qui regarderaient ce film.
Bref, on peut ne pas aimer du tout ce film pitoyable...
