Critique de
inconnu(e)
"Lorsqu'il illustrait les chansons de Mylène Farmer, Laurent Boutonnat avait déjà du mal à faire court. "Giorgino" confirme que, contrairement à quelques idées reçues, la pratique du clip publicitaire ou musical n'est pas forcément une école de concision. D'un certain point de vue, tirer un film de trois heures d'un scénario aussi indigent tient presque de l'exploit. Et puisque les ralentis, pourtant nombreux, n'expliquent pas tout, il faut bien conclure qu'on a affaire ici à un dramatique manque de maîtrise de la narration cinématographique. Tout ce qui advient à l'écran glisse sur la mémoire du spectateur pour sombrer aussitôt dans l'oubli, car aucun personnage, aucun thème esquissé n'est développé avec le minimum de cohérence. C'est peut-être là ce qui définit le mieux l'esthétique du clip tout en manifestant -hélas- les effets pervers : la complaisance envers l'instant, que l'on ne se préoccupe nullement d'enrichir par un "avant" et un "après". Chaque scène n'existe ainsi que par elle-même, comme ivre de sa propre vacuité, sans jamais trouver sa place dans une vision d'ensemble. Le film se présente donc comme une bouillie insipide à la surface de laquelle flotte quelques symboles et fantasmes de régression infantile, dont la perversité n'irrite que par sa gratuite et une superficialité soigneusement entretenue par le jeu des acteurs.