Critique de
JIPI
Existe-t-il une aussi grande comédienne que ce lingot d'or personnifié par Bette Davis capable en fonction des rebondissements d'une enquête, de passer de l'assurance d'un regard de glace aux plaintes les plus persuasives mêlées d'évanouissements judicieux afin de manipuler au maximum un environnement soumis ou respectueux, non conscient du mécanisme d'une créature vénale. "La lettre" tout en restant une œuvre lente et souffreteuse déblaie habilement les faux vêtements de lumière d'une créature froide et coupante voguant habilement entre un mari naïf et la faiblesse d'un avocat.Le choix de montrer une faune locale servile ou corrompue, toisée par un colon croulant sous le service, n'est pas du meilleur goût. Nous sommes dans les quotas de l'époque où tout ce qui vient de l'orient est jugé comme décalé et fourbe donc à manager par l'ordre et le mépris.La scène de la remise de la lettre est un moment grandiose. Deux femmes s'affrontent par une dominance vengeresse déclenchant une soumission calculée.Le remarquable prologue et épilogue lunaire, fil rouge porteur de toute l'œuvre, valorise l'alpha et l'oméga d'un contenu bien souvent terne. Il faut lutter contre quelques risques de somnolences afin d'atteindre, en pleine possession de ses moyens, dans l'ombre de l'astre de nuit, un dénouement fantastique presque extra terrestre par son esthétisme.La sublime est d'une beauté machiavélique en clamant ouvertement son adultère. Elle ne manque pas d'humour non plus par l'intermédiaire de cette phrase surprenante"J'ai voulu me faire belle, ça m'a pris du temps".